Récits

Panel de discussion de l’ITC : la facilitation du commerce demeure la clef du succès des exportations des PME

5 décembre 2013
ITC Nouvelles

L’importance croissante des chaines de valeur régionales et mondiales dans le commerce international fournit une opportunité unique pour augmenter les exportations des petites et moyennes entreprises (PME), grâce à leur intégration dans ces chaines de valeur. C’est la déclaration commune émise plus tôt ce jour par les participants au panel de discussion de l’évènement parallèle organisé par le Centre du Commerce International (International Trade Centre – ITC) lors de la neuvième Conférence ministérielle de l’Organisation Mondiale du Commerce (OMC) à Bali, en Indonésie. Cependant, sans les mesures appropriées pour la simplification du commerce transfrontalier, les PME ne peuvent pas être compétitives sur le marché global, « d’où notre pression sur les ministres présents à la Conférence pour qu’ils acceptent l’Accord de facilitation du commerce » explique Arancha González, Directeur exécutif de l’ITC et modérateur de la discussion. Elle précise encore : « La facilitation du commerce est à la fois le pain et le beurre des petites et moyennes entreprises ».

Grâce à l’émergence de chaines de valeur, les PME peuvent à présent s’engager dans le flux du commerce international, sans devoir être nécessairement compétent dans tous les domaines menant au produit final. Il y a toutefois encore un gros travail à accomplir pour créer les conditions favorables aux exportations des PME : plus d’un tiers des entreprises pensent que les problèmes liés à l’environnement des affaires représentent une contrainte majeure sur les exportations, selon une enquête auprès des PME exportatrices réalisée par l’ITC le mois dernier. (Voir l’article en anglais).

Le Rwanda montre la voie

Certains pays ont franchi des étapes majeures dans l’amélioration de la compétitivité à l’export de leurs entreprises. Dans le rapport 2014 « Doing Business » (« Faire des affaires ») de la Banque mondiale, le Rwanda était classé 32ème sur 189 pays en matière de facilitation pour mener des affaires, progressant de la 52ème place l’année précédente. Pour François Kanimba, le Ministre rwandais du Commerce et de l’Industrie, les réformes de la règlementation sont les principales raisons de l’amélioration de ce classement. Les droits de propriété ont été renforcés et les procédures administratives simplifiées, a-t-il expliqué à l’audience, avant de souligner : « Il suffit d’une journée, voire moins, pour enregistrer une nouvelle entreprise, et il est possible de le faire en ligne, même pour les étrangers ».

M. Kanimba rapportait que le gouvernement, constatant que l’accès aux financements semblait être le principal obstacle des PME lorsqu’elles cherchent à augmenter leur affaire, avait mis en place des institutions de prêt dans chaque village, ainsi qu’un système national d’information au crédit qui contribuait à réduire les risques des banques, et de ce fait augmentait les prêts.

Parallèlement, les infrastructures de transport demeurent encore fragiles, et un système à guichet unique pour simplifier les procédures douanières a été mis en place sur un tiers seulement des postes frontières. M. Kanimba concluait : « Il est clair que nous avons encore beaucoup à faire ».

Pour Alexander Stubb, Ministre finlandais des Affaires européennes et du Commerce étranger, qui partageait l’expérience de son pays, les pays en développement doivent se concentrer sur trois domaines principaux afin de faciliter leur intégration dans les chaines de valeur. Ils doivent créer le bon environnement des affaires pour attirer les investissements étrangers directs et renforcer les liens avec les multinationales présentes sur leur sol ; ils doivent fournir une protection sur la propriété intellectuelle afin d’encourager les innovations ; et ils doivent faciliter la création d’un secteur des services opérationnel qui puisse fournir les services commerciaux dont les producteurs ont besoins.

La facilitation du commerce est au centre de la chaine de valeur globale qui demande qu’un même produit traverse plusieurs fois les frontières durant sa production. Il a encore appelé à « nous débarrasser des vieux réflexes mercantiles qui prétendent que les exportations sont bonnes et les importations mauvaises, et penser plutôt en termes de chaines de valeur mondiales ». Comme exemple, il a cité le fournisseur d’équipement de télécommunication finlandais Nokia dont les smart phones contiennent des pièces provenant de 12 pays différents.

Les membres d’un autre panel de discussion ont également souligné que les PME des pays en développement font souvent face aux coûts anormalement élevés pour se mettre en conformité avec les douanes, les procédures douanières, ou les mesures non tarifaires, ce qui les empêchent d’être compétitives en tant que fournisseurs et les empêchent d’intégrer les chaines de valeur régionales et mondiales. (Voir l’article en anglais).

Les mesures non tarifaires

Les négociateurs gouvernementaux devraient se concentrer sur les défis logistiques, comme les barrières non tarifaires, qui ont repris le rôle des tarifs dans la limitation du commerce international, a déclaré Stefano Arganese, PDG de DHL Fret pour l’Europe Centrale, de l’Est et du Sud, les Amériques, le Moyen Orient et l’Afrique. « La corrélation entre le commerce et la logistique est extrêmement forte, en particulier pour les biens intermédiaires échangés au sein de la chaine de valeur ». Il a cité les recherches menées par le Forum économique mondial, qui montre que la réduction des barrières des chaines d’approvisionnement du commerce pourrait augmenter le PIB mondial six fois plus que de supprimer tous les tarifs restant.

Selon M. Arganese, un accord sur la facilitation du commerce pourrait être particulièrement bénéfique pour les pays les plus pauvres. « Les pays en développement ont des coûts commerciaux bien plus élevés que les pays développés. La facilitation du commerce doit atteindre un niveau minimum pour que les investisseurs ouvrent des boutiques dans un pays. »

Tandis que le Rwanda a amélioré ses infrastructures immatérielles de manière impressionnante depuis les dernières années, le manque d’infrastructures de transport adéquates font que l’envoi d’un container depuis Kigali, au Rwanda, jusqu’à Mombasa, au Kenya voisin, coûte autant que d’envoyer un container de Mombasa à Shanghai, en Chine.

Le soutien au commerce à la rescousse

Il n’y a pas que les gouvernements, mais aussi les associations de commerce qui peuvent soutenir les PME et leur permettre de rejoindre les chaines de valeur régionales et mondiales, a déclaré Mulu Solomon, Président de la Chambre de commerce et du Secteur des associations d’Éthiopie. Il y a aussi la faible productivité, les problèmes de qualité, la difficulté à fournir en temps et en heure, et le manque d’expérience dans les procédures douanières, qui sont autant de problèmes de capacité auxquels sont confrontées les PME.

La Chambre de commerce fournit des formations sur des sujets divers, y compris sur les problèmes de taxes et les recherches de marchés, a-t-elle encore expliqué. La Chambre de commerce a aussi entamé un dialogue avec le gouvernement pour simplifier les acquisitions de licence, l’enregistrement des nouveaux commerces, et les procédures douanières. De fait, les règlementations ont été modifiées, et le gouvernement travaille actuellement sur l’introduction de procédures à guichet douanier unique pour diminuer le poids de l’administration et le coût du commerce pour les entreprises.

La priorité pour les PME est d’identifier les niches où se trouvent leurs avantages compétitifs, et ensuite de se concentrer sur ces petits segments, explique Enrique Ortiz, Directeur Général de Camtronics, fabricant d’électronique du Costa Rica, qui s’est intégré avec succès dans la chaine de valeur de plusieurs multinationales œuvrant dans la télécommunication, les appareils médicaux, l’aérospatial, et les secteurs de contrôle industriel. « Nous avons appris à la dure, à travers nos propres erreurs » a-t-il précisé. Une fois que vous faites partie d’une chaine d’approvisionnement, votre entreprise doit continuer d’innover afin de grimper le long de cette chaine de valeur. Se rappelant son expérience des années 1990, quand les fabricants des États Unis ont commencé à délocaliser vers la Chine, il a souligné : « Vous ne pouvez pas rivaliser seulement sur les prix ».

Pour rejoindre des chaines de valeur, les PME doivent pouvoir convaincre les multinationales qu’elles peuvent compenser les coûts commerciaux comme le fret, les frais des agents douaniers et les charges administratives, a-t-il encore ajouté. Plus ces frais sont bas, plus c’est facile pour les PME de rejoindre les chaines de valeur.

Un rôle de facilitation que les gouvernements peuvent facilement jouer est de construire l’image de leur pays en tant que destination de délocalisation et de créer un environnement propice pour les investissements étrangers directs, a conclu M. Ortiz. « J’avais l’habitude de penser que de fournir des performances excellentes était suffisant » pour attirer les clients. « Mais j’ai réalisé que c’était une condition normale. L’infrastructure et le savoir-faire technique général des entreprises locales sont ce qui motivent [les investisseurs] à se lancer dans des plans d’investissement ».

Besoin de plus d’assistance technique pour surmonter les barrières commerciales

Il y a un besoin important d’assistance technique pour résoudre les problèmes engendrés par les mesures non tarifaires à l’encontre du commerce, pas seulement vis-à-vis des biens mais aussi des services, afin d’améliorer la compétitivité globale.

Mme González a confirmé que l’ITC allait poursuivre son assistance aux PME dans les économies en développement et en transition, afin de les aider à intégrer les chaines de valeur régionales et mondiales. L’ITC travaille avec les responsables politiques et les institutions d’appui au commerce pour promouvoir les politiques et les règlementations commerciales qui peuvent contribuer à créer un environnement des affaires propice aux PME. Cela inclut la facilitation du dialogue privé-public pour la préparation des politiques commerciales.