Avis d'experts

Parité au sein des petites entreprises : le rôle des programmes commerciaux

15 décembre 2021
Federica Cristani, Centre de droit international de l’Institut des relations internationales, Prague , Prof. Elisa Fornalé et Paula Busch, Institut mondial du commerce, Université de Berne

Les petites entreprises appartenant à des femmes demeurent moins intégrées dans les marchés internationaux que celles appartenant à des hommes.

 

Selon les Perspectives de la compétitivité des PME 2021 du Centre du commerce international, les petites et moyennes entreprises (PME) représentent environ 90 % des firmes et comptent pour 50 % de l’emploi dans le monde, et près de 40 % appartiennent à des femmes.

Bien qu’elles participent constamment au commerce international, les petites entreprises détenues par des femmes demeurent moins intégrées dans les marchés internationaux que celles détenues par des hommes.

Quelle en est la raison ?

De manière générale, nous pouvons identifier deux obstacles majeurs à l’intégration des petites entreprises dirigées par des femmes dans le commerce international.

1. Obstacles réglementaires

 

Lorsqu’il s’agit de créer une entreprise ou de pénétrer un marché, les femmes sont victimes de discrimination lors de la mise en œuvre des règles pertinentes. Selon le rapport de la Banque mondiale Les femmes, l’entreprise et le droit 2021, les femmes ne bénéficient que des trois quarts des droits dont jouissent les hommes (sur 190 pays étudiés).

Ce constat est surtout évident au Moyen-Orient et en Afrique du Nord, où, par exemple, les femmes doivent obtenir la permission d’un tuteur masculin pour enregistrer une entreprise.

Dans les pays développés aussi les femmes sont victimes de discrimination. Il suffit de rappeler qu’en Suisse, entre autres, les femmes mariées n’ont plus besoin du consentement de leur mari pour ouvrir un compte bancaire depuis seulement 35 ans.

2. Barrières sociales et culturelles

 

Les préjugés sociaux et culturels peuvent affecter la participation des femmes à l’économie, à la fois dans les pays en développement et développés. Une étude menée en 2019 par HSBC Private Banking auprès de femmes entrepreneures dans huit pays d’Amérique du Nord, du Moyen-Orient, d’Europe et d’Asie a révélé que plus d’un tiers des femmes ont été victimes de préjugés sexistes dans la gestion de leur entreprise.

Dans le même ordre d’idées, une étude réalisée en 2019 par le professeur Mabel Abraham de la Columbia Business School a montré que les dirigeants masculins étaient généralement préférés aux dirigeants féminins.

Enfin, comme le montre une note d’orientation de 2020 du Secrétaire général des Nations Unies, la situation s’est aggravée pendant la pandémie de COVID 19, en particulier dans les pays en développement.

Comment le commerce international peut-il aider à combler ces lacunes ?

 

Les obstacles réglementaires peuvent être évités grâce à des mesures réglementaires appropriées – et leur mise en œuvre correcte peut aider, par extension, à surmonter les obstacles d’ordre social et culturel.

À cet égard, l’inclusion progressive de dispositions relatives à l’égalité des genres dans les accords de libre-échange accroît l’engagement politique et peut fournir une base réglementaire pour les décisions financières lors de la mise en œuvre de programmes en matière de parité.

Il est intéressant de noter que certains accords de libre-échange régionaux font déjà spécifiquement référence à la promotion des petites entreprises appartenant à des femmes, à l’exemple de l’accord entre les États-Unis, le Mexique et le Canada. Ce nouvel accord appelle expressément à une coopération accrue sur les « activités de promotion des PME appartenant à des groupes sous-représentés, y compris les femmes » (Article 25.2).

En outre, dans l’Accord instaurant la Zone de libre-échange continentale africaine, les parties ont convenu de « mobiliser des ressources, en collaboration avec les partenaires de développement [...] en vue [...] d’améliorer la capacité d’exportation [... des] fournisseurs de services aux petites et moyennes entreprises, aux femmes et à la jeunesse » (Article 27). Le Traité du COMESA, pour sa part, stipule que les parties s’engagent à « promouvoir des programmes spéciaux en faveur des femmes dans les petites et moyennes entreprises » (Article 155).

Par conséquent, les politiques commerciales pourraient jouer un rôle important, par exemple dans la définition de l’accès au crédit pour les petites entreprises, ou dans la formation technique des femmes entrepreneures. Cela participerait à une approche globale et inclusive pour parvenir à la parité entre les genres.