Le commerce et les objectifs de développement durable
Le GTO chargé de proposer une série
d’ODD a clôturé 18 mois de discussions
à la mi-juillet, en approuvant
17 objectifs et 169 cibles suggérés pour
remplacer les OMD, qui arrivent à échéance
l’année prochaine. Dans les OMD, les politiques
commerciales étaient comprises dans
l’objectif 8 – développer un partenariat pour
le développement – surtout afin de permettre
la croissance économique à travers un meilleur
accès au marché pour les exportations
des PED. Selon les commentateurs participant
au débat sur les ODD, le nouveau
programme devrait permettre d’intégrer les
politiques commerciales dans les plans de
développement. Roberto Azevêdo, Directeur
général de l’OMC, a récemment souligné
que le rôle du commerce dans le programme
pour l’après-2015 'ne devrait pas être réduit uniquement à la libéralisation des échanges,
mais plutôt être reconnu plus largement
comme un outil politique de développement'.
Les ODD proposés reflètent en quelque
sorte cette approche plus intégrée du
commerce et du développement durable,
puisqu’ils mentionnent un certain nombre
d’objectifs liés au commerce. Certains
d’entre eux sont des moyens intersectoriels
de mise en place pour tout le programme,
et comprennent notamment la conclusion
du Cycle de Doha et l’augmentation des
exportations des PED et de l’accès au marché
pour les PMA. D’autres objectifs liés au commerce
figurent parmi les objectifs pertinents
du programme.
L’objectif 8 sur la croissance économique
durable et inclusive est soutenu par une cible
de mise en place visant à augmenter l’APC. Cela fait écho à l’indicateur 8.9 des OMD sur
la proportion de l’aide internationale pour
le développement allouée au renforcement
des capacités commerciales. L’intégration
de cibles liées au commerce dans les objectifs
pertinents – telles que la réduction
des subventions à la pêche, préjudiciables
dans le cadre de l’objectif concernant les
océans, et la prévention des restrictions au
commerce dans les marchés agricoles dans
le cadre de l’objectif visant à éradiquer la
faim – reflètent l’idée selon laquelle un cadre
politique cohérent intégrant des politiques
commerciales soigneusement élaborées peut
aider à atteindre les objectifs d’intégration
économique, sociale et environnementale.
Étant donné que 95% de l’économie
mondiale est composé de PME, ces producteurs
forment l’épine dorsale de l’économie mondiale et représentent un moteur de
croissance clé pour les PED. Certaines
cibles liées au commerce visent à assurer
que les petits producteurs ont accès aux
entrants essentiels, en particulier aux ressources
naturelles, aux services financiers et
aux marchés.
ACCÈS AUX MARCHÉS
L’objectif 2, éradiquer la faim, vise à doubler
la productivité agricole et les revenus
des petits producteurs de denrées alimentaires
d’ici à 2030 à travers l’amélioration
de l’accès aux terres et à d’autres intrants,
aux services financiers et aux marchés pour
leurs produits. L’objectif 14, sur la conservation
et l’utilisation durable des océans et
des mers, comprend une cible spécifique de
mise en place qui vise à améliorer l’accès
aux ressources marines et aux marchés pour
les petits pêcheurs artisanaux.
L’accès au financement joue un rôle
essentiel dans les rouages du commerce
mondial; il a été cité par les PED comme la
principale contrainte à la participation à la
chaîne de valeur mondiale (Panorama de
l’Aide pour le commerce 2013: Se connecter
aux chaînes de valeur, OMC/OCDE,
2013). L’objectif 8 sur la croissance économique
durable et l’emploi mentionne une
cible visant à encourager la formalisation et
la croissance des PME, notamment à travers
l’accès aux services financiers. L’objectif 9
sur l’infrastructure résiliente, l’industrialisation
durable et l’innovation comprend
également une cible visant l’accès par les
petites entreprises des PED aux services
financiers, à des crédits accessibles et à l’intégration
dans la chaîne de valeur.
Alors qu’on se félicite du programme des
ODD proposés, quelques lacunes persistent. Deux en particulier touchent les PME:
améliorer la capacité des commerçants à
faire circuler les marchandises à travers les
frontières et reconnaitre l’importance des
services pour la diversification économique
et le développement.
INFRASTRUCTURE POUR LE COMMERCE
Une version antérieure de l’objectif 9
comprenait une cible visant à améliorer
l’infrastructure transfrontalière afin de promouvoir
la connectivité régionale et faciliter
les échanges. Les ODD proposés intègrent
l’infrastructure transfrontalière dans une
cible plus large visant le développement d’infrastructures
accessibles de haute qualité pour
soutenir le développement économique. Vu que le commerce peut être un moteur pour
le développement, il serait utile de maintenir
une référence à l’investissement dans l’infrastructure
en vue de faciliter le mouvement
de marchandises à travers les frontières.
La facilitation des échanges est certes
utile pour tous les commerçants, mais elle
l’est particulièrement pour les petites entreprises,
dont la capacité d’absorber les coûts
imposés par une faible infrastructure et
une réglementation excessive est souvent
réduite. De plus, cela sera une façon utile de
soutenir leur capacité à utiliser l’accès aux
marchés offerte dans le cadre d’autres cibles
des ODD.
LES SERVICES ET LA CROISSANCE
Alors que les ODD mettent à raison l’accent
sur l’importance des services financiers
capitale pour les PME, ils pourraient souligner
l’importance des crédits à l’exportation
et du financement du commerce pour les
petits exportateurs et refléter plus clairement
l’importance des services pour la diversification
et le développement de l’ensemble des
économies. Cela pourrait, à son tour, offrir
des opportunités pour les petites entreprises.
Une recherche menée par la Banque mondiale
établit la corrélation entre la croissance
du secteur des services et la réduction de la
pauvreté et la manière dont elle contribue
à la création d’emplois (The Service Revolution,
2010). L’ITC a également souligné
l’importance des opportunités dans l’industrie
des services pour les PME, notant que le
Rwanda, le Sénégal et d’autres PMA africains
sont déjà dotés de politiques de soutien à l’exportation
de services externalisés.
Alors que l’objectif 8 fait référence à la
diversification économique, au développement
du tourisme durable et au renforcement
des capacités des institutions financières
nationales, de manière générale le programme
semble donner plus d’importance
à la diversification des secteurs industriels.
Le fait d’ajouter une référence au soutien à
la diversification économique en matière de
services pourrait contribuer à intégrer plus
clairement dans le programme une source
importante de création d’emplois, de réduction
de la pauvreté et de développement. Un
argument similaire a été avancé par d’autres
commentateurs, notamment From the
Millennium Development Goals to the Sustainable
Development Goals: Learning the
lessons from the trade diagnostic studies in
the Pacific. (Gay, Keane et Basnett, Institut
de développement d’Outre-mer, 2014).
Les services représentent déjà deux tiers
de la production mondiale et des emplois, et
ils devraient continuer à s’étendre à tous les
niveaux du développement. Une exploitation
réussie de ces moteurs modernes de croissance
devrait constituer une partie importante d’un
programme qui cherche à fournir une feuille
de route pour le développement international
pour les 15 prochaines années.