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Agriculture sous contrat : débouchés et risques

28 septembre 2011
ITC Nouvelles

La production et la distribution agroalimentaires connaissent de rapides mutations, notamment sous l’influence de la croissance démographique mondiale. La population mondiale devrait atteindre 9 milliards d’ici 2050 et les terres agricoles fertiles suscitent de plus en plus de convoitises.

Dans nombre de pays, les petits lopins de terres agricoles connaissent une fragmentation rapide. En Inde, la taille moyenne des exploitations agricoles était de 2,2 hectares en 1970. Elle n’est plus que d’un hectare aujourd’hui. À l’autre extrémité de la chaîne alimentaire, le commerce de détail organisé se développe et se consolide.

Pour les gouvernements et les agences techniques comme l’ITC, une des difficultés consiste à recenser les activités génératrices de revenus pour améliorer les moyens de subsistance des petits producteurs dont les lopins de terre se réduisent comme peau de chagrin, et de fournir d’autres services nécessaires tels l’accès au crédit, au savoir-faire technologique et aux informations sur le marché.

L’agriculture sous contrat est un moyen de tisser des liens avec les agriculteurs. L’approche n’est pas nouvelle mais elle soulève d’importantes questions, tant pour les agriculteurs que pour les décideurs politiques, sur fond de crises alimentaires récurrentes et de pénurie de terres. Les agriculteurs vont être de plus en plus invités à signer ces contrats qui présentent à la fois des avantages et des inconvénients. L’agriculture sous contrat exige souvent une réglementation adéquate par les gouvernements, et les agriculteurs devraient être informés de ses avantages et de ses inconvénients.

Un accord agriculteur-entreprise

L’agriculture sous contrat (aussi appelée ‘contrat de production’) est définie comme un arrangement à durée déterminée conclu entre un agriculteur et un entrepreneur avant le début de la production, en vertu duquel l’agriculteur accepte de vendre ou de livrer à l’entrepreneur une culture donnée cultivée sur un lopin de terre précis et d’une manière particulière, en échange de quoi l’entrepreneur accepte de payer l’agriculteur selon des modalités données et à une date convenue. L’agriculture sous contrat n’est pas uniquement un modèle de développement, mais les agriculteurs devraient être informés et formés à ces contrats qui se multiplient. Ils portent fréquemment sur des produits tels les tomates, les concombres et la volaille.

Avantages et risques

L’agriculture sous-contrat fournit aux agriculteurs des intrants (semences et engrais, par exemple), un contrôle qualité, et des conseils sur les nouvelles méthodes de production. Les prix sont déterminés à l’avance et des facilités de crédit peuvent être associées au contrat. L’agriculture sous contrat peut avant tout faire de l’agriculture une activité rémunératrice.

Cependant, les agriculteurs consentent des investissements à long terme, en construisant, par exemple un système de drainage, pour exécuter un contrat à court terme. La résiliation anticipée du contrat par l’entrepreneur se traduit alors par une perte. Si le paiement est effectué après la récolte, l’agriculteur est totalement tributaire de l’entrepreneur. Si la récolte est perdue, l’agriculteur supporte le risque et aucun dédommagement n’est habituellement versé.

Pour les investisseurs et les entrepreneurs, l’agriculture sous contrat permet de venir à bout des contraintes foncières et est plus acceptable au plan politique. La qualité est contrôlée par l’investisseur et les risques inhérents aux récoltes sont partagés avec les agriculteurs. Cependant, les investissements dans la formation et le savoir-faire, le mécontentement de l’agriculteur et les éventuels différends, la commercialisation hors contrat par l’agriculteur et le détournement par l’agriculteur des intrants qui lui sont fournis, sont autant de risques qui pèsent sur l’entrepreneur.

Atténuer les risques juridiques de l’agriculture sous contrat

Étant donné le recours croissant par les entreprises privées aux arrangement de production sous contrat avec les agriculteurs, les gouvernements devraient envisager de réglementer l’agriculture sous contrat afin de protéger les petits agriculteurs, en imposant un certain nombre d’obligations contractuelles. Celles-ci devraient inclure une durée de contrat minimum de trois à cinq ans, une définition claire du statut de l’agriculteur (sous-traitant indépendant ou employé), les modalités de paiement et les conditions de résiliation du contrat.

Autre aspect de cette pratique communément négligé: l’absence de mécanismes de règlement des différends facilement accessibles, non seulement en cas de résiliation du contrat mais aussi pour régler des problèmes récurrents de paiement, de balances et mesures, de qualité et de quantité. Les centres d’arbitrage commercial et de médiation commerciale créés dans la plupart des pays offrent rarement des services concrets et bon marché directement aux petits agriculteurs.

Pour finir, les agriculteurs ont besoin de conseils juridiques sur les divers arrangements contractuels. Dans les économies en développement, les juristes possèdent rarement ce type de compétences. L’ITC propose donc dans ce domaine ses modèles de contrats types ainsi que ses services spécialisés de formation et de conseil. Pour atteindre la ferme/le champ, la meilleure solution consiste à prodiguer ces conseils par le biais des pôles agricoles ou des centres de transfert du savoir destinés aux organisations de petits exploitants agricoles.

Pour plus d’informations, contacter Jean-François Bourque à l’adresse: bourque [at] intracen.org